Hugo Bertillot et Damien Vanneste sont deux sociologues que nous croisons régulièrement. En effet, ils participent également au « collectif ‘Initiative Innovation Vieillissement’ » organisé par l’ADULM (Agence de Développement et d’Urbanisme Lille Métropole) mais aussi dans le cadre de la création de la CMR (Commission Mixte de Recherche) dont nous sommes membres depuis 2024.
Nous vous proposons de revenir sur leur recherche en sociologie intitulée « L’expérience de la vie collective par les habitants d’un « béguinage » pour personnes âgées. Motivations plurielles, projections ambivalentes et relations à géométrie variable ». Cette recherche a fait l’objet d’un article que vous pouvez retrouver dans la revue Vie sociale d’avril 2022 (n°40) – Étions Érès.
La vie collective dans un béguinage selon Beguinage & Compagnie
La recherche réalisée par les sociologues est très en lien avec ce que nous entendons lors des entretiens individuels effectués auprès des habitants « candidats » pour les logements de type « béguinage ». Nous recueillons en effet systématiquement leurs motivations à quitter un logement qui ne convient pas ou plus (chapitre 1). Elles se recoupent souvent de cette manière :
- Raisons économiques et écologiques : offre limitée en logements abordables (sociaux) et avec une dimension écologique
- Raisons architecturales : logements non adaptés
- Raisons sociales : ressenti d’un isolement pour certains et l’envie d’un partage entre voisin pour d’autres. Un vécu personnel difficile peut aussi expliquer un « nouveau départ ». Parfois, le changement de logement s’explique par la prise de décision des enfants, voire du professionnel médical.
Dans la plupart des cas, un logement adapté, selon les habitants c’est un logement de plain-pied, avec une douche dans la salle d’eau (à la place de la baignoire) et la présence d’un service de proximité pour aider au quotidien mais également renseigner quand de nouveaux besoins se font sentir.
Quelle dynamique sociale observée dans les béguinages ?
Nous pouvons alors nous questionner sur la dynamique sociale des projets d’habitats de ce type. Les deux sociologues ont abordé ce sujet à travers le chapitre 2 « Des projections ambivalentes concernant le voisinage ». Ce volet « collectif » avec cette vie de voisinage est pour certains assez nouvelle. Voici ce qui ressort des résultats obtenus :
- Nous comprenons qu’un accompagnement en amont de l’entrée dans les logements, comme Béguinage & Compagnie le réalise à travers ses ateliers particip’actifs, aide à se projeter
- Certains vont cependant émettre une certaine prudence par rapport à la vie collective notamment du fait de la proximité des logements. Pour autant, des évolutions positives ressortent des discours des habitants interviewés
- D’autres expriment naturellement être venus chercher ces relations de voisinage.
Peu importe le « niveau d’acceptation » de cette proximité entre voisins et ce partage de temps communs, dans la plupart des projets que nous avons accompagné jusqu’ici, c’est le temps qui fait les choses !
Donner le temps au temps…
Et c’est ce qui ressort dans le chapitre 3 « Au quotidien, des relations de voisinage à géométrie variable ». Les sociologues ont observé deux tendances : certains habitants cherchent à maintenir les relations telles que celles entretenues avec leur voisinage précédent. D’autres doivent recomposer en créant de nouveaux liens sociaux.
Ces deux types de relation de voisinage font que la vie communautaire s’est peu développée : courtoisie, mais c’est tout et c’est bien ainsi / temps collectifs de temps en temps mais pas de réel partage ce qui provoque chez certains de la déception. Cette réalité constatée dans ce béguinage est acceptée pour la plupart, mais d’autres sont frustrés. Les attentes émises lors des ateliers « particip’actifs » n’ont pas été vraiment comblées.
Il y a pour autant l’émergence de relations d’affinité, supports à des liens de solidarité : échanges de bons procédés, commérage sur les problèmes techniques, discussions entre voisins grâce aux espaces extérieurs (parking, allées et jardinets partagés) et à la proximité des habitations.
En conclusions, les 2 sociologues notent que les ateliers de Béguinage & Compagnie, proposés avant l’entrée dans les logements facilitent cette interconnaissance entre futurs voisins. Il revient cependant aux habitants et à la commune de poursuivre la dynamique créée, grâce à la mise à disposition d’une salle collective afin que chacun puisse s’investir dans cette vie communautaire. Cela est parfois facilité par la présence d’un professionnel dédié à la coordination du lieu de vie grâce à l’AVP.